Ce 30 juillet, nous avons appris qu’un chauffeur de bus du réseau de transports Divia a été agressé à Dijon car il demandait à ce que le respect du port du masque soit respecté. Deux mineurs de 16 ans ont été placés en garde à vue. Ces actes inqualifiables font évidemment écho au terrible drame qui est survenu à Bayonne où un chauffeur, Philippe Monguillot, 58 ans, a été assassiné sur son lieu de travail. Comme insoumis, comme républicain et comme humaniste, je serai toujours du côté des victimes, et toutes mes pensées sont dirigées vers les personnes agressées, leurs familles ainsi que leurs proches. Soutien également à la profession et aux syndicalistes défendant un droit de retrait des chauffeurs. C’est clair, net et précis et cela n’ouvre pas à débat ou discussion.
Je voudrais pousser un coup de gueule. Dans le sillage de ces intolérables agressions, une petite musique est en train de monter. Il s’agit de l’émergence d’une parole raciste qui se fait voir. Non pas qui se libère. Nous n’en sommes malheureusement plus à une libération de la parole raciste, mais une habituation. Comme si de rien n’était. Pourquoi je dis cela ? Parce que sur les sites des journaux locaux ou nationaux, ont sous les publications Facebook ou Twitter, des palanquées de commentaires douteux ou ouvertement racistes.
C’est à se demander ce que font les modérateurs des sites, ou déjà, si les sites ont des modérateurs. Durant des heures, nous avons le droit aux « analyses » totalement racistes et assumées comme tel. Comme si dans notre pays, finalement, cette parole était normalisée. « Moi raciste oui pour les gens violents ». Je ne savais pas que la violence était intrinsèque à des considérations ethniques, de couleurs de peau, de religions ou que sais-je encore. Ici, nous avons donc une personne qui revendique publiquement son racisme. Nous sommes en 2020, et le racisme n’est pas une opinion. C’est un délit. Et ce genre de commentaires reste visible des heures durant sans que personne sur les sites ne supprime ces commentaires. Censure crieraient certains ? Non, le respect de la loi et des individus. Mais ce racisme à front de bœuf, finalement chacun peut le voir, il est sale, bête, primaire. Mais le racisme insidieux fait encore plus de dégâts. Le sous-entendu, le non-dit, la suspicion, cet immonde racisme qui a conscience de lui-même et qui se drape dans l’innocence du non-dit pour ne pas avoir à assumer devant la loi son caractère anti-républicain.
Ce racisme insidieux a une rhétorique. Celle que l’on voit sortir des réseaux d’extrême-droite et qui contamine le reste de la société. Il rend visible avec le fameux « on veut les noms », ou alors, « tout est permis, surtout pour certains ». J’ai volontairement masqué les noms des personnes car le but n’est pas de les exposer pour faire du shaming. Je n’aime pas cette pratique. Je ne fais que sortir les paroles brutes, telles qu’elles sont exprimées sur les réseaux sociaux. Et puis, il n’est même pas question d’anonymat sur les réseaux sociaux. Tous ces gens signent de leur vrai nom.
Alors que faisons-nous collectivement ? On voit passer ces commentaires et on laisse faire en se disant que décidément notre société va mal ? On se moque de ces gens qui sont racistes parce qu’ils n’ont jamais rien vu, et on se place au-dessus d’eux avec une sorte de mépris en restant hautains ? Ou alors, on rentre en confrontation, on les met face à leurs contradictions et on fait pression sur les modérations de site afin que soit respecté le fait que oui, le racisme n’est pas une opinion, mais un délit ? Personnellement, je penche pour la dernière solution, mais nous devons être nombreux, car seul, on ne va pas bien loin.